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'Prêt à' versus 'près de'  -  par JulienConstant

'Prêt à'  versus 'près de'

La clé première de tout apprentissage est l'imitation, qui s'ancre dans la mémoire par la répétition. Bref le rabâchage ne mérite pas la mauvaise réputation que les pseudo-pédagogues lui ont faite.

Mais la mémoire fonctionne en permanence ; elle enregistre tout, sans discernement. Plus le signal est puissant, abondant, répété, plus efficace et profonde sera l'imprégnation. 

Sans référence comparative solide acquise par l'apprentissage volontaire, les événements répétitifs s'impriment dans notre esprit et remplacent les savoirs consolidés, les reléguant d'abord dans la mémoire passive, puis les enfouissant si loin profondément qu'ils se perdent. J'en note fréquemment sur ces pages de nouveaux exemples, qui me brûlent les oreilles, surtout quand c'est un instituteur en retraite qui les régurgite en toute inconscience, mais aussi quand un chroniqueur d'une grande chaîne de télé les produit. Et personne n'est là, en régie, pour rectifier les âneries telles que "la gente masculine", ou bien "dévaster", au lieu de 

"Nous ne sommes pas prêts (en capacité) de voir Mamy."  L'orthographe juste était 'près' (proximité spatiale ou temporelle).  C'est le résultat du mécanisme exposé plus haut. On peut gloser : "Nous sommes bien loin de la revoir."

Même les grands auteurs, qu'on ne lit plus guère, commettaient cette erreur.

Aujourd'hui elle se répand extrêmement vite, car nous entendons "elles ne sont pas prêtes de... " tous les jours ; il suffit d'allumer la télé ou la radio.

EN apprenant la chanson l'araignée Carmen avec ma petite fille, je découvre cette erreur dans le dernier couplet :

Je suis Carmen l'araignée et pic, pic, pic, du soir au matin
Vous ne pouvez pas nous empêcher
De venir voir au grenier nos copains
Je suis Carmen l'araignée et je règne sur ce maudit grenier
Vous êtes Carmen l'araignée, et vous n'êtes pas prête de m'échapper.  I
l eut fallu écrire près de cher Jean-Jacques

La mémoire de millions de parents et d'enfants a donc enregistré cette bêtise que youtube continue de diffuser avec ses spectacles.  Comment espérer qu'un enseignant qui ne voit que 6000 élèves dans sa carrière puisse rectifier ? Ainsi se délite le français, abîmé par l'énorme chambre d'écho des médias où s'expriment les "élites".

https://reporterre.net/Nos-mains-cherchent-desesperement-un-refuge?utm_source=newsletter&utm_medium=email&utm_campaign=nl_quotidienne

Nos mains, nos dents, nos odorats et le reste de nos sens sont menacés, avertit notre chroniqueur : le numérique veut tout neutraliser. Mais la flamme et l’imagination que nous possédons ne sont pas prêtes de s’éteindre...


​https://reporterre.net/Nos-mains-cherchent-desesperement-un-refuge?utm_source=newsletter&utm_medium=email&utm_campaign=nl_quotidienne
  Nos mains cherchent désespérément un refuge

​Nos mains, nos dents, nos odorats et le reste de nos sens sont menacés, avertit notre chroniqueur : le numérique veut tout neutraliser. Mais la flamme et l’imagination que nous possédons ne sont pas prêtes de s’éteindre  
Je me permets de vous faire des signalements de temps à autre car vous acceptez, fait rarissime dans ma liste de contacts, de prendre amicalement en considération les remarques qui vous sont faites. C'est parfaitement cohérent avec votre rigueur journalistique.
Je vous lis chaque jour et vous verse dix euros chaque mois. Car je suis convaincu que Reporterre occupe une place unique et vitale dans l'offre de presse française. Mais il me semble qu'aucune équipe de rédaction ne soit consciente de sa responsabilité considérable dans l'évolution de la langue. ​Certes vos rédacteurs ne participent heureusement guère à l'épouvantable appauvrissement du français et l'affaiblissement de sa logique historique à cause du débarquement permanent de l'anglo-américain, et ​cela convient au professeur de français que je suis. Je comprends fort bien que le rythme de production des articles fouillés, argumentés, annotés constituent un travail colossal qui exclut un examen à la loupe des textes.
Mais ce qui m'ennuie, ce ne sont pas les coquilles, inexistantes d'ailleurs chez Reporterre, mais bien plutôt les erreurs grossières, car celles-là ne sont pas provoquées par le temps qui presse, mais la langue des auteurs, et aussi par le fait qu'ils subissent eux-aussi, en permanence, la pollution délétère des médias électroniques.
​J'aimerais que les journalistes se rendent compte qu'en imprimant une grossière erreur linguistique, ils annulent carrément mon travail. C'est en effet David contre Goliath.  En 30 000 heures d'enseignement, j'ai vu passer 6000 élèves.
Combien de milliers de lecteurs lisent cette bêtise : Nos mains, nos dents, nos odorats et le reste de nos sens sont menacés, avertit notre chroniqueur : le numérique veut tout neutraliser. Mais la flamme et l’imagination que nous possédons ne sont pas prêtes de s’éteindre... Ils la lisent dans vos lignes, mais aussi dans d'autres sources, et l'entendent à la radio, à la télévision...
Moi qui ai passé ma vie professionnelle à enseigner, je dois subir chaque jour les assauts de l'ignorance et du conformisme dans mes lectures et dans les paroles de mes divers interlocuteurs. Que ressent par exemple un jardinier qui voit chaque jour, impuissant, la nature piétinée ? Est-ce le fait d'être en retraite atténue la douleur ? 

Quand on voit que ni l'Académie Française, ni l'ARCOM, ne s'intéressent sérieusement à la question du devenir la langue, comment s'étonner, que ces petits cancers ne métastasent pas ? (cf. Alain Borer : " La langue évolue, le cancer aussi." Chaque média électronique et papier répétant benoîtement  les tics verbaux les plus idiots en totale inconscience ! Certes des linguistes alertent, documentent, mais qui les lit, à part... les linguistes ? 
Les "fautes" d'orthographe, multipliées à l'infini depuis l'industrialisation des médias, ont des conséquences, elles détruisent la vie, encore plus sournoisement que le cancer, comme le glyphosate, et les nanoplastiques. 

Publié le 09/12/2020 19:05   | |    |


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