Alberto MAGNAGH

Cette note est à la fois un résumé des ouvrages d'Alberto MAGNAGHI, et une analyse sur l'utilisation possible de ses idées, adaptées au contexte français.

A) Définition du territorialisme, principes de base, livres de référence.


1) Le territorialisme est un courant majeur de la pensée écologiste, hélas confidentiel en France.

D'origine italienne, le territorialisme peut se résumer ainsi : l'approche environnementaliste « bio-centrique » classique est insuffisante, car elle conduit à fixer une frontière entre "la Nature" et "l'Homme", avec l'idée qu'il faut préserver la première des activités du second. Cette opposition doit être dépassée : le territorialisme est donc un humanisme.
Pour cela, le territorialisme se veut "anthropo-biocentrique", dans le sens où son objectif est la recherche, sur un territoire donné (urbain et rural, en connexion avec d'autres territoires), d'un équilibre évolutif – donc non-figé dans le passé ou le présent - entre les éléments écologiques, géologiques, géographiques, historiques, économiques, urbanistiques, agricoles etc.., c'est-à-dire à la fois culturels et naturels, qui définissent l'identité d'un territoire sur la longue durée.


2) Une pensée articulée autour de quelques principes de base.

a) « le territoire est le résultat matériel d'un processus de co-évolution entre les établissements humains (organisés sur une base culturelle) et le milieu ambiant (organisé sur des bases géologiques et biologiques) ».
Le territorialisme préfère l'expression « milieu ambiant » au terme d' « environnement », lequel, étymologiquement, tient la nature « aux environs » de l'homme. « Milieu ambiant », au contraire, abolit symboliquement cette séparation, et nous ré-incorpore dans l'écosystème.
« Le processus de co-évolution interprète les règles du milieu ambiant à travers la médiance
culturelle propre à chaque civilisation, par laquelle le 'lieu' n'est ni nature, ni culture, mais le fruit d'une relation dynamique entre ses composants. »
                                                    
b) la « mondialisation » récente a entraîné une rupture fondamentale : l'« espace des flux » globalisés a écrasé l' « espace des lieux ».
* Ce phénomène a privé de pouvoir le champ politique (élus et citoyens), ou du moins considérablement réduit son influence, avec toutes les conséquences que l'on sait.
* Corollaire de cette mondialisation, l'urbanisation galopante du tiers-monde, et la « métropolisation » des grandes villes des pays développés, ont dissocié les grands espaces urbains de leur milieu ambiant composé de villes moyennes et de zones rurales.
La dissociation entre la métropole et l'arrière-pays est géographique (extensions urbaines empiétant sur des zones agricoles de proximité), économique (rupture des approvisionnements locaux, malgré un léger « retour du local » encore marginal par rapport à la masse des échanges), culturelle (homogénéisation des métropoles entre elles).
* L' « espace des flux » (télématiques, commerciaux, médiatiques etc.) a entraîné la création d'une « seconde nature artificielle », dé-territorialisée, distincte du territoire, flottant « au-dessus » de ce dernier. Le sol n'est plus considéré que comme un plateau technique, un espace plan, sans histoire, simple support des activités humaines (ex. : agriculture industrielle).

c) utilisation de la notion de bien commun, qui fait aujourd'hui l'objet de travaux divers.
* L'approche territorialiste distingue les biens naturels (la Terre, l'air, l'eau, les sources naturelles d'énergie, les mers, lacs et rivières, les glaciers etc.), et les biens communs territoriaux, produits historiques de l'action de l'homme (bâtiments, villes et infrastructures historiques, systèmes agricoles, ports fluviaux et maritimes, unités de production d'énergie, paysages etc.)
Les biens communs s'inscrivent dans une continuité historique de longue durée, et sont destinés à être transmis aux générations futures, non pas figés mais en s'inscrivant dans l'identité du territoire.

                                                                                  
* En conséquence, la notion de bien commun suppose une autonomie de certains éléments territoriaux, par rapport aux biens privés et publics. Il ne s'agit pas de remettre en question le droit de propriété, mais d'en organiser l'usage civique pour certaines composantes (ex. : refus de privatiser les espaces publics ; promotion de politiques paysagères et architecturales, non seulement dans quelques zones urbaines et rurales protégées, mais sur l'ensemble du territoire).

d) la notion de bio-région urbaine.
* Pour l'école territorialiste, l'idée de bio-région urbaine permet de repenser les rapports entre villes et campagnes, dans un souci d'équité territoriale, à l'opposé de la vision « centre métropolitain / périphérie » ; elle permet de reconnecter la ville avec son environnement géographique, et réciproquement.
* La dimension de la bio-région n'est pas définie, car elle dépend de la taille de la ville, du milieu ambiant considéré et de l'échelle à laquelle on se place (pour reprendre les catégories françaises : régions, départements, communes, quartiers urbains) : à chaque situation sa propre bio-région, qui peuvent s'emboîter façon « poupée russe ».
* La bio-région permet d'intégrer dans une même réflexion l'ensemble des éléments constitutifs d'un territoire : économie, environnement, histoire, lieux de vie et d'habitats dans les villages, bourgs et villes etc...

e) une nécessaire rénovation de la démocratie locale.
* Tous les acteurs locaux peuvent participer à la construction et la gestion du territoire. Une attention particulière sera portée sur la voix des acteurs les plus faibles, d'un point de vue économique et culturel.
* Un rôle important est donné aux associations locales et groupements citoyens spontanés dans la construction nouvelle du territoire. Transposé à la France, cela pourrait parfaitement ressembler à une version pacifique des « ZAD »… (comme c'est le cas dans la zone du « triangle de Gonesse », où une fédération de divers opposants au monstrueux centre commercial Europacity fait un travail intéressant à la fois de résistance et de proposition).
* L'action n'est d'ailleurs pas réservée aux habitants historiques : les échanges avec des personnes venues de l' « extérieur » permettent souvent d'enrichir la vie locale, et de structurer le cas échéant les résistances.
* Pour autant, les collectivités locales ne sont pas écartées, et doivent retrouver leur rôle de protecteurs et de promoteurs d'activités valorisant le territoire (réseaux agricoles locaux, artisanat, éco-tourisme, activités culturelles etc...)
* En outre, il faut souvent lutter contre un « localisme vandale », où des habitants et des élus hors de contrôle, avides d'avoir leur « part de métropole », détruisent leur propre territoire (ex. : en France, multiplication des centres commerciaux, y compris en zone rurale).
Il existe également un « localisme rapace », où des acteurs économiques locaux, pourtant bien intégrés, épuisent les ressources humaines et matérielles (ex. : Lactalis), et finissent parfois par délocaliser une grande partie de leur activité.

3) Un travail sur les sources est nécessaire.

Le principal représentant de l'école territorialiste est Alberto MAGNAGHI, architecte et urbaniste, professeur émérite à l'université de Florence.


magnaghicouverture.jpgDeux ouvrages ont été publiés en France : Le-projet-local.jpg


- Le Projet locall, paru en français en 2003, (éd. Mardaga) réimprimé en décembre 2016, est un texte fondateur. Ce petit livre (123 pages en tout) fourmille d'idées intéressantes, qu'il faut parfois dénicher au détour d'un paragraphe, voire d'une simple phrase.


- La Biorégion urbaine, petit traité sur le territoire bien commun (éd. Eterotopia/Rhizome, 2014, 174 pages), est davantage « pratique », contient des schémas et des cartes (d'Italie uniquement), et développe la notion de bio-région.
                                                 
Ces livres sont des synthèses de travaux plus étoffés d'A. MAGNAGHI, qui cite également les études de nombreux autres auteurs. Le style est donc souvent très dense, très « italien » aussi, avec de nombreuses « arabesques » (l'auteur reprend plusieurs fois les mêmes idées au fil des pages).
La clarté, disons-le subjectivement, n'est pas toujours au rendez-vous (surtout pour La Biorégion urbaine), mais la lecture n'est pas insurmontable, et s'illumine régulièrement de fulgurances.

B) L'approche territorialiste offre des outils permettant de penser et de mettre en œuvre une politique mettant fin à l'opposition entre les métropoles et les zones périphériques.


1) Une stratégie économique visant à réduire la dépendance envers l' « espace des flux ».
a) pour un territoire donné, tout miser, comme aujourd'hui, sur la connexion aux marchés mondialisés, contribue à sa fragilisation. La concurrence forcenée entre les régions et les pays finit par détruire le tissu territorial, et désorganiser les circuits économiques locaux, y compris pour les besoins primaires (alimentation, logement, habillement etc.). En clair : tout vient de l' « extérieur », et souvent de très loin.
Retrouver un maximum d'autonomie par rapport aux « flux » globaux permet d'augmenter le niveau de liberté des acteurs locaux (habitants, entreprises, agriculteurs etc.)

b) cependant cet objectif n'a rien à voir avec l'autarcie (économique ou culturelle), car ce retour au local s'accompagne d'une mise en réseau des bio-régions entre elles, et n'exclut absolument pas l'existence de relations commerciales plus étendues (exportation de biens et de produits à forte valeur ajoutée, car fondés sur un savoir-faire spécifique).
De plus, le contexte économique doit favoriser les « sujets économiques et sociaux porteurs d'innovations », pour éviter l'enfermement dans un conservatisme figé.
    
2) Pour un développement local « auto-soutenable », solide, diversifié, évolutif et résilient.
a) un système économique enraciné est souvent plus performant qu'un système dépendant des « flux » globaux : un tissu de PME, d'artisans et d'agriculteurs (sans exclure la présence d'industries plus importantes), attachés à leur territoire, et n'ayant pas sacrifié à l'idéologie de la mondialisation, est toujours préférable à la présence de quelques grands entrepôts, employant des personnels peu qualifiés et mal payés, installés ici pour des raisons fiscales, et susceptibles d'être délocalisés à tout moment.

b) dans la mesure du possible, la bio-région doit augmenter l'approvisionnement local en ressources (matérielles, énergétiques, alimentaires), par la construction de réseaux locaux de distribution.
Le cycle de l'eau ou la gestion des déchets sont organisés autour des mêmes réseaux.
De la même manière, la mobilité quotidienne des personnes doit être réduite, en l'organisant autour de chaque pôle de la bio-région, de façon réticulaire, et non plus sur le seul axe périphérie/métropole. La répartition des entreprises doit suivre un tel schéma non-hiérarchisé.

c) le territoire, avec toutes ses composantes, est en lui-même une source de valeur ajoutée, notamment économique, mais aussi culturelle et symbolique.
Le sol « plan » déterritorialisé de l' « espace des flux », support d'activités impersonnelles, voit sa valeur s'effondrer aux yeux des habitants, qui ne le respectent plus, et aux yeux des acteurs économiques et politiques, qui n'hésitent pas à le martyriser (ex : zone commerciale construite sur une zone humide « inutile et improductive »… Mais gare aux conséquences en cas d'orage !)    

e) correctement organisée, une bio-région urbaine, même composée uniquement de villes petites et moyennes, « en équilibre écologique, productif et social avec le territoire, peut s'affirmer aussi 'grande et puissante' qu'une métropole. Elle est même plus puissante que le système métropolitain centre-périphérie, parce qu'elle […] produit plus de richesse durable ».
Et ce au point de permettre l'amorce d'un contre-exode en faveur de zones aujourd'hui délaissées.
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3) Un programme de renaissance « identitaire » par l'aménagement du territoire.
a) une méthode « archéologique » visant à établir un atlas patrimonial.
* La rupture avec le contre-modèle métropole/périphérie nécessite une démarche de reconstruction des territoires. Pour cela, il faut identifier les persistances et les permanences – les invariants physiques et immatériels – qui serviront de fondations à la bio-région. Si la continuité historique a été rompue, cela demande un travail de recherche des savoirs accumulés au fil du temps, et de la situation paysagère traditionnelle.
* La notion d'identité, pour Alberto MAGNAGHI, s'inscrit certes dans le temps long, mais aussi dans une dynamique et un ensemble de réseaux relationnels, toujours en mouvement. L'identité, au sens territorialiste, peut s'articuler autour des notions fondamentales et complémentaires d'impermanence et de continuité.
Rien à voir, donc, avec la vision figée de l'extrême droite soi-disant « identitaire ».

b) la conception d'un scénario stratégique impliquant tous les acteurs locaux.
Un processus de planification souple et non-technocratique, adapté à chaque situation, laissant le pouvoir décisionnel aux acteurs locaux, se met en place.
Une fois identifiés, les éléments constitutifs servent à former un atlas écologique, économique et culturel du lieu, cadre structurel au sein duquel chacun va travailler.
Il s'agit d'abord de subvenir aux besoins liés à l'entretien de la bio-région, à la vie de ses habitants et à la gestion sociale du territoire : agriculture, logement, artisanat, petites entreprises tiennent donc une place de premier plan.


C) Des objectifs qui dépassent largement le cadre local : pour une mondialisation par le bas.

1) Une « utopie » à long terme, non-prédéfinie, s'opposant à la dystopie « technolâtre ».
a) face à la mondialisation uniformisante et aux métropoles qui assèchent leurs arrière-pays, la bio-région peut offrir les caractères d'un système vivant de haute complexité, porteur d'activités   nombreuses et diversifiées.
Une bio-région ne vit pas isolée : comme déjà précisé, elle existe en réseau avec les autres.
In fine, dans une perspective utopique, la vision d'une « planète fourmillant de bio-régions urbaines en réseaux » semble préférable à celle d'un monde dominé par des mégalopoles de science-fiction vers lequel nous nous dirigeons.
b) cependant le « résultat final » ou l' « objectif » n'est absolument pas défini à l'avance. Au demeurant, rien ne dit qu'il y ait un « objectif » à atteindre. Seul le processus est déterminé. Nous sommes dans le cas de figure où le chemin est plus important que la destination.

2) Vers une nouvelle relation avec les pays dits « sous-développés » du « tiers-monde ».
a) les principes territorialistes excluent l'application d'un modèle unique de développement. Les relations multi-polaires, non-hiérarchisées, basées sur la diversité des cultures, deviennent la règle.
L'autonomie des acteurs locaux est respectée, et les traditions locales peuvent servir de point d'appui dans l'élaboration de l'atlas patrimonial et du scénario stratégique.
b) l'effet recherché est l'inversion du processus de métropolisation sauvage et incontrôlé que connaissent les pays du « tiers-monde », qui crée des mégalopoles géantes et un appauvrissement des campagnes.
c) A. MAGNAGHI ne sous-estime pas les difficultés. Dans le « tiers-monde », les problèmes sont exacerbés (bidonvilles, inégalités sociales, déracinement etc.).
Le « localisme vandale » endogène peut être plus violent, notamment dans les pays dits « émergents », du fait de la fascination pour la « modernité » des gouvernements et des élites.
Ailleurs, la méthode « archéologique » de reconstruction peut être extrêmement complexe, voire « inconcevable », en raison de la destruction de certaines « structures » territoriales (matérielles ou immatérielles) pré-coloniales.      

D) Un point d'appui pour surmonter des clivages bien ancrés en France :

1) Un moyen de rétablir le dialogue entre chasseurs et écologistes.
a) A. MAGNAGHI évoque très peu la chasse, uniquement dans des notes en bas de page, dont l'une est la citation d'un autre auteur, concernant le rôle des biens communs :
« […] production de services naturels destinés à […] la conservation de la biodiversité, à l'utilisation pour la randonnée, la chasse et la pêche [...] ».
b) l'examen des principes du territorialisme permet de révéler le potentiel de cette école pour dépasser un clivage absurde. On a le droit, à titre individuel, de ne pas aimer la chasse et la culture qui l'entoure, mais le principe de la chasse n'est pas discutable, dès lors qu'il s'agit d'une chasse écologiquement responsable.
Certaines pratiques devront donc disparaître à terme, dès que la reconstitution de l'écosystème aura atteint un niveau satisfaisant (ex. : fin des lâchers de volailles d'élevage les veilles d'ouverture, qui révoltent y compris de nombreux chasseurs traditionnels, ne chassant que le gibier sauvage).  
Des convergences existent déjà (plantation de haies, reconstitution des lieux de reproduction du gibier etc.).  Extrémistes des deux bords mis à part, un rapprochement est donc imaginable.

2) Le complément qui manquait aux analyses de Christophe GUILLY (la « France périphérique »).
a) sans revenir sur les ouvrages du géographe, il faut rappeler que les Fractures françaises (économiques et culturelles) se manifestent concrètement sur le territoire.
Les ségrégations sociales augmentent, avec en parallèle une séparation physique (parfois invisible) des populations. Le ressentiment à l'encontre des « métropoles » exprimé par les « périphéries » devient clairement inquiétant et dangereux.  
Pour autant, les populations des grandes agglomérations (villes centres + banlieues), dans leur majorité (classes populaires et moyennes) sont les premières à souffrir directement de la métropolisation des mêmes agglomérations. Seules les populations aisées (cadres, professions intellectuelles supérieures, bourgeois « bobos » ou « tradis », hauts-fonctionnaires, « start-upers » etc...) en profitent.
b) face à cette évolution inquiétante, le territorialisme propose une perspective.
Comme indiqué plus haut, l'un des aspects de la méthode est de donner des moyens d'action politiques (au sens large) aux élus et aux populations, leur permettant d'agir à nouveau sur le réel.
D'un point de vue culturel et « identitaire », le travail de reconstruction historique et géographique peut s'apparenter, pour reprendre une référence française, à une version actualisée de la « République des petites patries » (par opposition aux régionalismes anti-républicains et à l'« identitarisme » d'extrême droite).

CONCLUSION : Une école de pensée conforme à la vision « décroissante » des choses.


En fait, il n'existe pas de point particulier qui soit incompatible.
Tout est une question de « dosage ». En effet, avec des « dosages » différents, le territorialisme, qui est davantage un contenant qu'un contenu, peut donner lieu à une lecture :
- libertaire (auto-organisation et autonomie des communautés locales) ;
- « démondialiste » (reconstitution de réseaux économiques locaux, relocalisation d'activités) ;
- « bio-conservatrice » anti-libérale (rejet de l'« économisme » qui met l'économie au centre de tout et rejette l'homme à la périphérie ; souci de respecter les cultures et les traditions locales), illustrée  par la revue LIMITE.
- « bio-souverainiste », développée notamment par Natacha POLONY, le jeune auteur Laurent OTTAVI (plutôt classé à droite), ou Aurélien BERNIER (classé à gauche) ;
- et bien sûr décroissante (le diagnostic de départ est identique : caractère insoutenable du mode actuel de développement ; impossibilité d'une solution technologique aux problèmes environnementaux ; dissociation de l'« espace des flux » d'avec les capacités physiques de la Planète etc.).
Ces différentes lectures, bien entendu, peuvent se compléter et s'enrichir mutuellement.
                                        


Date de création : 14/03/2019 15:57
Catégorie : - Territorialisme
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